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Contributeur:
Bruno Giroux
Vous trouverez les figures dans le PDF gratuit.
En décembre 2019, plusieurs patients de Wuhan, en République populaire de Chine, ont développé une pneumonie et une insuffisance respiratoire rappelant l’épidémie de SRAS en 2003 (WMHC 2019, www.SARSReference.com). Début janvier 2020, un nouveau virus a été identifié à partir d’échantillons de liquide de lavage broncho-alvéolaire et s’est révélé être un bêtacoronavirus nomme SRAS-Cov-2(Zhou 2020). Au moment de la rédaction de cet article (19 avril), le virus s’est propagé aux quatre coins du monde. Plus de 2,3 millions de personnes ont été diagnostiquées et plus de 160 000 personnes sont décédées. La maladie associée au SRAS-Cov2 a été nommée COVID-19
Dans ce chapitre, nous discuterons
- les voies de transmission du SRAS-CoV-2;
- l’épidémie naturelle de COVID-19 et l’épidémie 2.0;
- Confinement et mesure de ses effets;
- les caractéristiques de l’épidémie dans des endroits sélectionnés;
- sortie du déconfinement
- «pass COVID»;
- La deuxième vague épidémique.
Transmission
Propagation interhumaine
La transmission des coronavirus se fait par voie aérienne, fécale-orale ou par des fomites. (Un fomite est tout objet inanimé qui, lorsqu’il est contaminé ou exposé à des agents infectieux tels qu’un virus, peut transmettre une maladie à une autre personne, par exemple des boutons d’ascenseur, des robinets de toilettes, etc.) (Cai 2020). On suppose que le SRAS-CoV-2 se propage principalement par contact de personne à personne via des gouttelettes respiratoires générées par la toux et les éternuements. Il n’est pas clair si et dans quelle mesure d’autres voies de transmission sont pertinentes sur le plan épidémiologique.
La transmission interhumaine du SRAS-CoV-2 a été prouvée en quelques semaines (Chan 2020, Rothe 2020). On ne sait pas si la gravité des symptômes est un indicateur indirect de l’infectiosité. Même des individus asymptomatiques peuvent transmettre le virus et une proportion importante de transmission secondaire se produirait avant le début de la maladie (Nishiura 2020). Cependant, dans un rapport de cas, il n’y avait aucune preuve de transmission lors de 16 contacts étroits, dont 10 à haut risque, d’un patient souffrant d’une maladie bénigne dont les tests restaient positifs jusqu’à 18 jours après le diagnostic (Scott 2020).
Le virus SARS-CoV-2 est très contagieux, avec un nombre de reproduction de base R d’environ 2,5 (Chan 2020, Tang B 2020, Zhao 2020). [R indique le nombre moyen d’infections qu’un cas peut générer au cours de la période infectieuse dans une population naïve et non infectée.]
L’incubation moyenne est d’environ 5 jours (Li 2020, Lauer 2020). L’intervalle de série pour le COVID-19 – défini comme la durée entre un patient-cas primaire présentant des symptômes et un patient-patient secondaire présentant des symptômes – a été estimé entre 5 et 7,5 jours (Cereda 2020).
La question des fomites reste un sujet d’inquiétude pour le public. Une étude (van Doremalen 2020) a montré que le virus peut être détectable sous forme d’aérosol, jusqu’à trois heures dans l’air, quatre heures sur une surface en cuivre, jusqu’à 24 heures sur le carton et jusqu’à deux à trois jours sur du plastique et de l’acier inoxydable. D’où les conseils impératifs pour un lavage des mains régulier et approfondi.
La transmissibilité du SARS-CoV-2 ne semble pas être réduite dans des conditions de température élevée ou dans des atmosphères humides (Luo 2020).
Cependant, une étude suggère que de telles températures et une humidité relative élevée pourraient réduire la transmission de COVID-19 (Wang 2020). On ne sait toujours pas si et dans quelle mesure l’épidémie pourrait temporairement ralentir en Europe et en Amérique du Nord au cours de l’été 2020.
Propagation nosocomiale
Les hôpitaux semblent être un environnement favorable à la propagation du virus SARS-CoV-2. Dans certains cas, les hôpitaux peuvent être les principaux lieux de transmission de COVID-19, du fait des grandes concentrations de patients infectés,facilitantla transmission aux patients non infectés (Nacoti 2020). Au cours des 6 premières semaines de l’épidémie en Chine, 1716 cas parmi les agents de santé ont été confirmés par des tests de biologie moléculaire dont au moins 5 sont décédés (0,3%) (Wu 2020). Une étude rapporte que le virus a été largement distribué dans l’air et sur les surfaces des objets dans les unités de soins intensifs et les services généraux, ce qui implique un risque d’infection potentiellement élevé pour le personnel médical. La contamination était plus importante dans les unités de soins intensifs. Le virus a été détecté sur des sols, du matériel informatique d’ordinateur, des poubelles, des mains courantes de lit de malade et dans l’air à environ 4 m des patients (Guo 2020). Le virus a également été isolé à partir d’échantillons de cuvettes et d’éviers de toilettes, ce qui suggère que la présence de virus dans les selles pourrait être une voie de transmission potentielle (Young 2020, Tang 2020). Cependant, la plupart de ces études n’ont évalué que l’ARN viral. Il reste à confirmer si cela se traduit par un virus infectieux.
Bien que la propagation nosocomiale du virus soit bien documentée, des mesures appropriées de contrôle des infections à l’hôpital peuvent empêcher la transmission nosocomiale du SRAS-CoV-2 (Chen 2020). Cela a été bien démontré par le cas d’une personne sexagénaire qui s’est rendue à Wuhan le 25 décembre 2019, et de retour en Illinois le 13 janvier 2020 a transmis le SARS-CoV-2 à son mari. Bien que tous deux aient été hospitalisés dans le même établissement et aient partagé des centaines(n = 348) de contacts avec des TS, personne d’autre n’a été infecté (Ghinai 2020).
Cependant, travailler dans un service à haut risque, durant de longues durées de travail et une hygiène des mains sous-optimale après un contact avec des patients infectés étaient des facteurs associés à un risque accru d’infection chez le personnel de santé (Ran 2020). Au début de l’épidémie en mars 2020, environ la moitié des 200 cas en Sardaigne concernaient des hôpitaux et d’autres professionnels de la santé.
Fin mars, le personnel médical représentait respectivement 12% et 8% des cas d’infections espagnoles et italiennes déclarées. La question de savoir s’il devrait y avoir un port de masque systématique dans les hôpitaux fait encore débat. Le principale intérêt serait de donner au personnel de santé la confiance nécessaire pour intégrer et mettre en œuvre des pratiques de prévention (Klompas 2020).
Au 18 avril, 130 médecins étaient décédés en Italie (dont environ la moitié étaient des médecins de famille), 23 en Espagne et un nombre encore inconnu en France.
Transfusion
Lors d’une collecte de produits sanguins portant sur 2430 dons (1656 plaquettes et 774 sang total), des auteurs de Wuhan ont trouvé des échantillons de plasma positifs pour l’ARN viral chez 4 donneurs asymptomatiques (Chang 2020). On ne sait pas encore si l’ARN détectable implique une infectivité.
Dans une étude coréenne, sept donneurs de sang asymptomatiques ont ensuite été identifiés comme porteurs du virus. Aucun des 9 receveurs de plaquettes ou de transfusions de globules rouges n’a été testé positif pour l’ARN du SRAS-CoV-2 (Kwon 2020). Plus de données sont nécessaires avant de conclure à un risque de transmission lors de transfusions.
Établissements de soins de longue durée
Les établissements de soins de longue durée sont des lieux à haut risque de maladies respiratoires infectieuses. Dans un établissement de soins infirmiers qualifié du comté de King, Washington, États-Unis, 167 cas de COVID-19 ont été diagnostiqués en moins de trois semaines après l’identification du premier cas: 101 résidents, 50 personnels de santé et 16 visiteurs (McMichael 2020) (Tableau 1).
Parmi les résidents (âge médian: 83 ans), le taux de mortalité était de 33,7%. Les affections chroniques sous-jacentes comprenaient l’hypertension, les maladies cardiaques, rénales, le diabète sucré, l’obésité et les maladies pulmonaires. L’étude démontre qu’une fois introduit dans un établissement de soins de longue durée, le SRAS-CoV-a le potentiel de se propager rapidement et largement.
Tableau 1. Epidémie de COVID dans un établissement de soins de longue durée | ||||
Résidents (N = 101) |
Personnel de santé (N = 50) |
Visiteurs (N = 16) |
||
Âge médian (extrêmes) | 83 (51-100) | 43.5 (21-79) | 62.5 (52-88) | |
Femmes (%) | 68.3 | 76 | 31.2 | |
Hospitalisé (%) | 54.5 | 6.0 | 50.0 | |
Décès (%) | 33.7 | 0 | 6.2 | |
Comorbidités (%) | ||||
Hypertension | 67.3 | 8.0 | 12.5 | |
Maladie cardiaque | 60.4 | 8.0 | 18.8 | |
Maladie rénale | 40.6 | 0 | 12.5 | |
Diabète | 31.7 | 10.0 | 6.2 | |
Obésité | 30.7 | 6.0 | 18.8 | |
Maladie pulmonaire | 31.7 | 4.0 | 12.5 | |
Navires de croisière et porte-avions
Les bateaux de croisière transportent un grand nombre de personnes dans des espaces confinés. Le 3 février 2020, 10 cas de COVID-19 ont été signalés sur le bateau de croisière Diamond Princess. Dans les 24 heures, les passagers malades ont été isolés et évacués du navire tandis que le reste des passagers était mis en quarantaine à bord. Par la suite, plus de 700 passagers sur 3700 et les membres d’équipage se sont révélés positifs (~ 20%). Une étude a suggéré que sans aucune intervention, 2920 personnes sur 3700 (79%) auraient été infectées (Rocklov 2020). L’étude a également montré qu’une évacuation précoce de tous les passagers le 3 février n’aurait conduite qu’à induire l’infection de 76 personnes. A ce jour, tous les navires de croisière sont à quai dans les ports du monde entier et font donc face à un avenir incertain. Déplacer de telles concentrations de personnes sur les océans d’un endroit à un autre pourrait ne pas être un modèle commercial viable pour les années à venir.
Les grands navires de la Marine semblent également propices à de grandes épidémies. Au cours d’une épidémie sur le porte-avions USS Theodore Roosevelt fin mars, environ 600 marins sur un équipage de 4 800 personnes ont été infectés par le SRAS-CoV-2 (voir également l’entrée du 30 mars de la chronologie); environ 60% sont restés asymptomatiques. Un marin est décédé le 17 avril (USNI News). Sur le porte-avions français Charles-de-Gaulle, une épidémie massive a été confirmée le 17 avril. Parmi les 1760 marins, 1046 (59%) étaient positifs pour le SRAS-CoV-2, 500 (28%) présentaient des symptômes, 24 (1,3%) marins ont été hospitalisés, 8 sous oxygénothérapie et un en soins intensifs.
Zones sensibles de transmission pendant le confinement
Il semble que dans des conditions de confinement strictes (au domicile et autorisée uniquement à aller travailler et faire des achats essentiels), la transmission continue principalement dans les endroits où les gens sont surpeuplés et / ou travaillent en étroite collaboration:
- Hôpitaux
- Établissements de soins de longue durée
- Prisons
- Porte-avions et autres navires militaires
La pandémie
Pandémie naturelle
L’épidémie de COVID-19 a commencé à Wuhan, dans la province du Hubei, en Chine, et s’est propagée en 30 jours du Hubei au reste de la Chine continentale, aux pays voisins (en particulier, la Corée du Sud, Hong Kong et Singapour) puis à l’ouest, en Iran, en Europe et dans le continent américain. Les premiers grands foyers sont apparus dans des régions aux hivers froids (Wuhan, Iran, Italie du Nord, région Alsace en France).
Il y a cent ou même cinquante ans, la pandémie de COVID-19 aurait suivi son cours naturel. Avec un taux de mortalité d’environ 0,5%, COVID-19 aurait entraîné dans le monde 7,0 milliards d’infections et 40 millions de décès au cours de la première année (Patrick 2020). Le pic de mortalité (décès quotidiens) aurait été observé environ 3 mois après le début des épidémies locales. Un modèle prévoyait que 80% de la population américaine (environ 260 millions de personnes) aurait contracté la maladie. Parmi eux, 2,2 millions seraient morts, dont 4% à 8% d’Américains de plus de 70 ans (Ferguson 2020).
Certains politiciens ont sérieusement envisagé un tel complot de pandémie 1.0, spéculant sur les avantages de «laisser-le-virus-aller à l’échec» à savoir :
- Le pays éviterait un ralentissement économique spectaculaire qui semble inévitable dans les pays et les États qui ont opté pour des mesures de confinement strictes (Italie, Espagne, France, Californie, New York, etc.).
- Après trois mois, 70% de la population serait vaccinée contre de nouvelles réapparitions de l’infection (par le biais d’une infection par le SRAS-CoV-2) et serait en mesure d’anticiper la prochaine saison hivernale sans inquiétude. (Combien de temps durerait une telle immunité acquise? Peut-être seulement quelques années. Voir le chapitre Immunologie, page Erreur: source de la référence non trouvée).
À la mi-mars 2020, le Premier ministre d’un ancien pays de l’UE a ainsi introduit la notion d ‘«immunité collective» comme une solution à l’épidémie à laquelle sa nation était sur le point de faire face. Son traitement de choc: accepter qu’une grande majorité de la population contracte le virus, développant ainsi une immunité collective et évitant les épidémies de coronavirus dans un avenir immédiat. Les chiffres étaient désastreux. Avec un peu plus de 66 millions d’habitants, quelque 40 millions de personnes auraient été infectées, 4 à 6 millions seraient tombées gravement malades et 2 millions auraient nécessité des soins intensifs. Environ 400 000 Britanniques seraient morts. Le Premier ministre a prédit: «Beaucoup plus de familles vont perdre des êtres chers avant l’heure.»
Pandémie 2.0: Confinement
Heureusement, pour l’instant, le monde a été préservé d’un SARS-CoV-2 circulant librement. Après tout, l’humanité peut changer le climat, alors pourquoi ne devrait-elle pas pouvoir changer le cours d’une pandémie? Bien que les économistes aient averti que le chômage pourrait dépasser les niveaux atteints pendant la Grande Dépression dans les années 1930, presque tous les gouvernements ont estimé que sauver des centaines de milliers de vies était plus élevé que d’éviter une récession économique massive. D’abord en Chine, six semaines plus tard en Italie et encore une semaine plus tard dans la plupart des pays d’Europe occidentale, une expérience sans précédent d’ampleur gigantesque a été lancée: ordonner à des nations entières de se confiner. En Italie et en Espagne, on a ordonné aux gens de rester chez eux, à l’exception des «activités essentielles» (achat de nourriture, de médicaments et autres nécessités) et d’aller à l’hôpital ou au travail. On a dit aux Italiens chez eux même le jour populaire de Pasquetta, le « petit Pâques » , où les gens affluent généralement à la campagne pour profiter d’un pique-nique en famille et entre amis. Les Italiens n’étaient même pas autorisés à se déplacer d’un village à un autre.
Résultats du confinement
Le résultat de telles mesures peut être évalué par le nombre de :
- Personnes infectées par le SRAS-CoV-2
- Admission à l’hôpital
- Patients traités dans des unités de soins intensifs (USI)
- Décès
Nombre d’infections
La communication quotidienne par les autorités de santé des personnes nouvellement diagnostiquées infectées par le SRAS-CoV-2 est devenue un rituel dans la plupart des pays. Ces chiffres sont en effet un indicateur de l’évolution d’une épidémie nationale et des effets des mesures de confinement.
Cependant, ces données ne reflètent pas le nombre réel d’infections. Pour connaître les réelles incidence et prévalence , il faudrait tester l’ensemble de la population, ce qui n’est bien sûr pas envisageable. Les meilleures estimations ne peuvent être faites que par modélisation mathématique. Étonnamment, les premiers modèles précis de l’épidémie européenne ont révélé que les cas de COVID-19 signalés ne représentent qu’une fraction des personnes réellement infectées. Un modèle basé sur les décès observés dans 11 pays européens a suggéré que les vraies infections étaient beaucoup plus élevées que les cas signalés (Flaxman 2020).
Selon ce modèle, au 28 mars, en Italie et en Espagne, environ 5,9 millions et 7 millions de personnes auraient pu être infectées par le SRAS-CoV-2, respectivement (tableau 2). L’Allemagne, l’Autriche, le Danemark et la Norvège auraient les taux d’attaque les plus faibles (proportion de la population infectée). Si ces hypothèses étaient validées, le nombre réel de cas serait supérieur au nombre de cas signalés le 28 mars (Italie: 92 472; Espagne: 73 235; France: 37 575) jusqu’à deux ordres de grandeur.
[Les données fournies par Flaxman et al. invite immédiatement tout un chacun à faire de « l’épidémiologie en cuisine ». En premier lieu si le 28 mars le nombre de personnes infectées en Italie était d’environ 6 millions (avec un intervalle crédible de 2 à 15 millions) et si nous supposons que 18 jours plus tard, le nombre total de décès en Italie était d’environ 30 000 (le chiffre officiel rapportée le 15 avril était de 21 645 décès), la mortalité due au COVID-19 en Italie pourrait être de l’ordre de 0,5% (0,19% -1,6%).
En second lieu, si fin mars, environ 60% de tous les décès en Italie avaient été signalés en Lombardie, qui compte 10 millions d’habitants, 60% des 6 millions d’infections à SARS-CoV-2, soit 3,6 millions, se seraient produites. De plus, 20% de tous les décès en Italie ont été signalés dans la seule province de Bergame, qui compte 1,1 million d’habitants. Des études de séroprévalence permettront de trier ces chiffres prochainement.]
Tabelle 2. Estimation de la population infectée le 28 mars 2020. | ||
Pays Morts le 28 Mars |
Pourcentage de la population infectée* | Population infectée* |
Autriche 68 |
1.1% (0.36%-3.1%) | 96,800 (31,680-272,800) |
Belgique 353 |
3.7% (1.3%-9.7%) | 425,500 (149,500-1,115,500) |
Danemark 65 |
1.1% (0.40%-3.1%) | 63,800 (23,200-179,800) |
France 2,314 |
3.0% (1.1%-7.4%) | 2,010,000 (737,000-4,958,000) |
Allemagne 433 |
0.2% (0.28%-1.8%) | 166,000 (232,400-1,494,000) |
Italie 10,023 |
9.8% (3.2%-26%) | 5,919,200 (1,932,800-15,704,000) |
Norvège 23 |
0.41% (0.09%-1.2%) | 21,600 (4,860-64,800 ) |
Espagne 5,982 |
15% (3.7%-41%) | 7,035,000 (1,735,300-19,229,000) |
Suède 105 |
3.1% (0.85%-8.4%) | 316,200 (86,700-856,800) |
Suisse 264 |
3.2% (1.3%-7.6%) | 275,200 (111,800-653,600) |
Royaume-Uni 1,019 |
2.7% (1.2%-5.4%) | 1,798,200 (799,200-3,596,400) |
*moyenne (95% intervalle de confiance)
Données présentées par Flaxman S et al. (Imperial College COVID-19 Response Team). Report 13: Estimating the number of infections and the impact of non-pharmaceutical interventions on COVID-19 in 11 European countries. 30 March 2020. DOI: https://doi.org/10.25561/77731
Admissions dans les unités de soins intensifs
Un indicateur fiable de la tendance épidémique est le nombre de personnes traitées dans les unités de soins intensifs. En France, le nombre de nouvelles admissions en unité de soins intensifs à l’hôpital a culminé le 1er avril (figure 1), tandis que la variation quotidienne des personnes traitées en unité de soins intensifs (l’équilibre entre les entrées et les sorties en unité de soins intensifs; figure 2) a commencé à être négative une semaine plus tard.
Figure 1. Nombre quotidien de nouvelles admissions en unité de soins intensifs pour COVID-19. Source: Pandémie de Covid-19 en France, Wikipedia.
Figure 2. Variation quotidienne du nombre de personnes en soins intensifs pour COVID-19. Source: Pandémie de Covid-19 en France, Wikipedia.
Décès
Les infections asymptomatiques passent inaperçues même lorsqu’il n’y a que des symptômes légers ou modérés. Malheureusement les décès, non. Par conséquent, les décès reflètent mieux la réalité de l’épidémie de COVID-19 que le nombre de personnes infectées par le virus. Les figures 3 et 4 rapportent le nombre de décès en Italie et en Espagne du 4 mars au 19 avril.
Cependant, ces chiffres sont encore incomplets et seront bientôt corrigés à la hausse. (De 10%, 30%, 50% ou plus? Personne ne le sait encore.) En Italie, en particulier dans les régions les plus touchées du Nord, un certain nombre de personnes sont décédées chez elles et n’apparaissent pas dans les statistiques officielles. En Espagne, de nombreuses municipalités ont noté une surmortalité non reflétée dans les chiffres nationaux. En France, comme dans d’autres pays, les décès des établissements de soins de longue durée n’étaient pas initialement inclus dans les rapports.
Figure 3. Mortalite par SARS-Cov-2 en Italie et en Espagne du 4 mars au 19 avril. Source: worldometers.info, Johns Hopkins CSSE
La figure 3 montre que le nombre de décès quotidiens diminue environ trois semaines après la mise en œuvre des mesures de confinement (Italie: 8/10 mars; Espagne: 14 mars).
Pays et continents
Le 23 janvier, la Chine a ordonné le premier confinement massif de l’histoire. Les pays européens ont suivi 6 semaines plus tard. Étonnamment, presque aucun pays européen n’était vraiment préparé à l’épidémie de COVID-19, bien que tout le monde ait pu observer les événements en Chine pendant plus d’un mois. Lorsque les pays européens ont finalement ordonné des mesures de confinement, celles-ci n’étaient pas aussi strictes ni imposées aussi rapidement qu’en Chine. Dans certains pays, le confinement a été activé pendant plusieurs jours (Italie), tandis que dans d’autres pays, les moyens de transports ont continué à fonctionner tandis que des habitants en grand nombre faisaient du jogging avec insouciance dans les rues (Paris, France). Dès le début, il était donc clair que l’épidémie européenne aurait un retard de quelques jours voire semaines par rapport à la Chine pour entrevoir une diminution des taux d’infection et de la mortalité. Les paragraphes suivants résument les caractéristiques distinctives de l’épidémie par pays.
Chine
La propagation à l’échelle nationale et dans toutes les provinces en janvier 2020 a été favorisée par les voyageurs depuis Wuhan avant le festival du printemps chinois (Zhong 2020).
À partir du 23 janvier, la Chine a imposé un confinement de la population de Wuhan et plus tard de toute la province du Hubei. Cette étonnante première de l’histoire humaine a mise en oeuvre ce que même les spécialistes n’osaient pas rêver: endiguer une épidémie causée par un virus hautement contagieux (Lau 2020). Ce choix de confinement rigoureux des personnes dans les zones à haut risque, est maintenant déclinée par les nations du monde entier, chacun ajoutant des particularités plus ou moins efficaces.
La figure 6 montre que dès la quatrième semaine après le confinement stricte de Wuhan la mesure était capable de contenir l’épidémie de SRAS-CoV-2. Les résultats sont présentés sous forme de courbes épidémiques COVID-19 des cas confirmés en laboratoire, à l’apparition des symptômes (bleu) et selon la date des rapports (orange). Les données ont été compilées le 20 février 2020, quatre semaines après le début des mesures de confinement de près de 60 millions de personnes dans la province du Hubei ainsi que des restrictions de voyage pour des centaines de millions de citoyens chinois. Les colonnes bleues montrent que (1) l’épidémie a rapidement augmenté du 10 au 22 janvier, (2) que les cas signalés (par date de début) ont atteint un pic et un plateau entre le 23 janvier et le 28 janvier et (3) qu’ils ont diminué régulièrement par la suite (à l’exception d’un pic signalé le 1er février). Sur la base de ces données, nous pourrions nous attendre à une baisse des cas signalés environ trois semaines après la mise en œuvre de mesures de confinement strictes.
Trois mois après le début de l’épidémie, les autorités chinoises ont commencé à lever les restrictions de déplacement, ramenant lentement la vie à la normale même dans les provinces les plus durement touchées.
Dans une étude sur les cas signalés jusqu’au 11 février, parmi 44 672 cas confirmés, la plupart étaient âgés de 30 à 79 ans (86,6%), diagnostiqués au Hubei (74,7%) et considérés comme bénins (80,9%) (Wu 2020). Au total, 1 023 décès sont survenus parmi les cas confirmés, pour un taux de mortalité global de 2,3%.
Figure 4. Épidémie chinoise en janvier / février 2020. Courbes épidémiques par début de symptôme et date de notification le 20 février 2020 pour les cas de COVID-19 confirmés en laboratoire pour toute la Chine. Modifié de Report of the WHO-China Joint Mission on Coronavirus Disease 2019 (COVID-19). 16-24 février 2020. https://www.who.int/publications-detail/report-of-the-who-china-joint-mission-on-coronavirus-disease-2019-(covid-19)
Les modèles ont estimé comment la mise en quarantaine et les restrictions de mouvement ont déterminé l’issue de la première épidémie chinoise. Selon un modèle, sans l’interdiction de voyager à Wuhan, il y aurait eu 744 000 cas au 19 février, jour 50 de l’épidémie (Tian 2020). Rien qu’avec l’interdiction de voyager à Wuhan, le nombre de cas serait tombé à 202 000.
Lombardie et Italie
L’Italie a été le premier pays européen frappé par la pandémie. Une analyse complète du génome des isolats du SRAS-CoV-2 suggère que le virus a été introduit à plusieurs reprises (Giovanetti 2020). Bien que le premier cas local n’ait été diagnostiqué que le 20 janvier, la force de l’épidémie suggère également que le virus circulait depuis des semaines, peut-être dès le 1er janvier (Cereda 2020). Des Milanais se souviennent d’avoir discuté de la fréquence inhabituelle de pneumonie dès la mi-janvier (Dario Barone, communication personnelle).
On ne sait pas encore pourquoi l’épidémie a pris un tournant aussi dramatique dans le nord de l’Italie, en particulier en Lombardie, tandis que d’autres régions, en particulier les provinces du sud, sont relativement épargnées. L’un des événements les plus répandus a peut-être été le match de football de la Ligue des champions entre Atalanta (Bergame et Valence) le 19 février au stade San Siro de Milan. Quarante-quatre mille fans d’Italie et d’Espagne ont assisté à la victoire de 4 à 1 de l’équipe italienne.
Les transports en commun de Bergame à Milanainsi que les festivités qui ont suivi dans d’innombrables bars ont été considérées par certains observateurs comme une «bombe biologique» de SRAS-CoV-2. Cette hypothèse est soutenue par une étude récente qui a visualisé des gouttelettes de fluide oral générées par la parole avec une diffusion de lumière laser (Anfinrud 2020). L’étude a révélé que les aérosols et les gouttelettes augmentaient avec l’intensité de la parole. Des cris forts et persistants, comme cela serait habituel lors d’une qualification 4 à 1 pour le quart de finale de la Ligue des champions, peuvent être supposés produire le même nombre de gouttelettes produites par la toux (Chao 2020).
Comment serait il possible de manquer le début d’une épidémie aussi importante? Les signes sur le mur étaient déjà inscrits, mais les déchiffrer n’était pas simple. Pendant la saison annuelle de la grippe, les décès dus à COVID-19 chez les personnes âgées pourraient facilement être interprétés comme des décès dus à la grippe. À l’autre extrémité de la tranche d’âge, parmi le groupe d’âge social le plus actif – les jeunes entassés dans les bars, les restaurants et les discothèques -, le virus du SRAS-CoV-2 rapidement n’aurait pas causé de symptômes mortels. Avant d’exploser, l’épidémie a eu le temps (au moins un mois) de se développer.
Espagne
L’Espagne est actuellement le pays européen avec le plus grand nombre de cas signalés et projetés (Flaxman 2020). La région la plus durement touchée par l’épidémie est la Communauté de Madrid, accumulant 28% des cas confirmés à la mi-avril.
Heureusement, le Mobile World Congress de Barcelone, le plus grand congrès technologique du monde prévu du 24 au 27 février, a été annulé deux semaines auparavant, bien que les autorités sanitaires aient insisté sur le fait qu’il n’y avait aucun risque. La décision a été prise après que certaines des plus grandes sociétés technologiques (entre autres LG, Facebook, Sony et Vodafone) aient suspendu leur participation par crainte d’une contagion à grande échelle de la part des participants. Ce fut le premier coup porté à l’industrie touristique espagnole.
Le 14 mars, le gouvernement espagnol a décrété un “état d’alerte” pour quinze jours, le prolongeant le 26 avril pui jusqu’au 9 mai, bien que les enfants de moins de 12 ans puissent «circuler» à partir du 27 avril. La libre circulation des citoyens se limite à l’achat de nourriture et de médicaments ou à la visite de centres médicaux ou du lieu de travail (au 20 avril, environ 20% de la main-d’œuvre va travailler). Des masques et des gants sont désormais remis à toute personne entrant dans le métro, et seront remboursés par les autorités sanitaires à partir du 22 avril.
France
L’épidémie en France a mise en évidence l’importance du paramétre le plus important dans la prise en charge de l’épidémie de COVID-19: le nombre de lits disponibles dans les unités de soins intensifs, équipés de respirateurs et entièrement géré par du personnel spécialisé. La première flambée nationale a eu lieu dans l’est de la France à Mulhouse, en Alsace, près de la frontière suisse et allemande, où les conditions étaient remplies pour une diffusion du SRAS-CoV-2 parmi les participants à un rassemblement évangélique du 17 au 24 février. Trois semaines plus tard, des patients ont commencé à remplir les hôpitaux locaux, dépassant rapidement les capacités d’accueil. Des patients dans des conditions graves ont du être transportés par avion vers l’Allemagne, la Suisse et le Luxembourg. Puis, le week-end du 21 mars, pratiquement d’un jour à l’autre, des patients ont afflué dans les hôpitaux de la région Île-de-France où le nombre de lits disponibles en unité de soins intensifs est passé de 1400 à 2000 au cours de la semaine précédente. Au plus fort de l’épidémie, plus de 500 patients ont été évacués des points chauds épidémiques comme l’Alsace et la région parisienne vers des régions de moindre cas de COVID-19. Des trains et des avions TGV spécialement adaptés ont été employés, transportant des patients jusqu’en Bretagne et dans la région de Bordeaux au Sud-Ouest, à 600 km de Paris et 1000 km de Mulhouse. La gestion française des lits de soins intensifs a été un énorme succès logistique.
Royaume-Uni
Au Royaume-Uni (comme dans certains autres endroits comme le Brésil et les États-Unis), les manœuvres politiques maladroites et / ou le déni de la réalité du COVID-19 ont retardé le début des mesures de verrouillage efficaces d’une semaine ou plus. Avec une épidémie dont l’incidence de patients atteints doublait tous les 7 jours environ (Li 2020), environ 50% et 75% des décès auraient pu être évités grâce à l’isolement ou à l’éloignement social ordonné une ou deux semaines plus tôt, respectivement. Les données préliminaires d’Irlande et du Royaume-Uni semblent confirmer cette hypothèse. L’histoire se souviendra.
Le faible taux de mortalité en Allemagne
Le taux de mortalité allemand semble être inférieur à celui des autres pays. Au 11 avril, le pays avait signalé 2 736 décès pour 122 171 cas (ration de mortalité [CFR]: 1,9%). Cela contraste fortement avec l’Italie (18.849 décès, 147.577 cas; CFR: 12.8%), l’Espagne (13.197 décès, 124.869 cas; CFR: 10.6) et le Royaume-Uni (8.958 décès, 73.758 cas; CFR: 12.1%). On suppose que la principale raison de cette différence est simplement la pratique étendue du test diagnostic. Alors que d’autres pays effectuaient un nombre limité de tests sur des patients âgés atteints de cas graves de virus, l’Allemagne effectuait de nombreux autres tests qui incluaient des cas moins graves chez les jeunes (Stafford 2020). Plus le nombre de personnes présentant des symptômes nuls ou légers est testé , plus le taux de mortalité est faible. Des tests RT-PCR fiables ont été mis au point dés fin janvier (Corman 2020).
De plus, dans le système de santé publique allemand, les tests SARS-CoV-2 ne se limitent pas à un laboratoire central comme dans de nombreux autres pays, mais peuvent être effectués dans des laboratoires contrôlés à travers le pays. En quelques semaines, la capacité globale a atteint un demi-million de tests RT-PCR par semaine. Le même faible taux de mortalité est observé en Corée du Sud, un autre pays avec un taux de tests élevé.
Les mesures de confinement étant moins strictes en Allemagne – les gens devaient rester chez eux mais pouvaient se déplacer plus librement qu’en Italie et en Espagne – les semaines à venir pourront valider ou non l’efficacité de cette approche de distentiation.
Une autre raison importante de la faible mortalité en Allemagne est la répartition par âge. Au cours des premières semaines de l’épidémie, la plupart des gens ont été infectés lors de carnavals ou de vacances au ski. La majorité avait moins de 50 ans. La mortalité dans ce groupe d’âge est nettement inférieure à celle des personnes âgées.
Amérique du Nord
Comme en Iran, où le régime a dissimulé pendant trois jours les informations sur le coronavirus pour éviter d’avoir un impact sur la participation aux élections législatives du 21 février, la politique intérieure (c’est-à-dire la crainte que la perturbation économique ne nuise aux chances de réélection; voir le British Medical Journal, 6 mars 2020) a influencé la riposte à l’épidémie aux États-Unis. Au 19 avril, plus de 700 000 cas et 40 000 décès avaient été signalés, dont près de la moitié en provenance de New York et du New Jersey. Le nombre total de décès de la première vague COVID-19 pourrait atteindre 60 000, dont au moins la moitié aurait pu être évitée (voir l’article britannique, page 20). En raison d’un vide sans précédent dans le leadership, les États-Unis sont maintenant l’épicentre de l’épidémie de COVID-19.
Australie et Nouvelle-Zélande
En Australie, le nombre total de nouveaux cas a augmenté de façon exponentielle après la confirmation du premier cas le 25 janvier, s’est stabilisé vers le 22 mars et a commencé à baisser début avril. Au 19 avril, 6 606 cas avaient été signalés, dont près de 50% en Nouvelle-Galles du Sud.
La Nouvelle-Zélande a signalé le premier cas de COVID-19 le 28 février. Le 26 mars, le gouvernement a mis en place un confinement national où les citoyens ne pouvaient quitter leur domicile que pour des activités telles que l’accès aux services essentiels. Les contacts étroits n’étaient autorisés qu’avec des personnes du même ménage. Avec une population de 5 millions d’habitants, le pays comptait 1 431 cas le 19 avril. Douze personnes sont décédés.
Sortie de confinement
Au cours des prochaines semaines, les pays qui ont ordonné le confinement devront mettre en place des modalités de sortie équilibrées, comme normaliser et restaurer les activités sociétales, tout en minimisant le risque de déclencher une deuxième vague de contagion. (Normile 2020). Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit une contraction de 3% du PIB de la planète en 2020. Dans une récession sans pareille en temps de paix depuis près d’un siècle, les pays de la zone euro, les États-Unis et le Royaume-Uni pourraient connaître une contraction de l’activité comprise entre 5,9% et 7,5%. Sur le plan économique, un confinement prolongé n’est pas viable. Ce qui peut être fait une fois – l’isolement d’un mois de l’ensemble de la population – ne peut probablement pas être répété.
Les pays devront décider quelles activités ouvrir dans quel ordre, fixer un calendrier, déterminer si certaines régions doivent quitter le confinement plus tôt que d’autres et décider quelles activités seront fermées pendant 6 mois ou plus, éventuellement jusqu’à la disponibilité générale d’un vaccin:
- Minimiser la transmission
- Tous les rassemblements de masse devront probablement être interdits, y compris les événements sportifs, les festivals et les cinémas, discothèques et bars. Pour être efficaces, certains pays peuvent prolonger certaines de ces interdictions jusqu’à ce qu’un vaccin soit disponible pour tous.
- Différer en partie l’ouverture des cours universitaires où l’enseignement peut être organisé comme une éducation en ligne.
- Porter des masques faciaux en public (Anfinrud 2020).
- Maximiser l’activité économique (tout en garantissant la distanciation sociale)
- Les jeunes adultes doivent pouvoir retourner au travail, les écoles doivent ouvrir le plus tôt possible pour s’occuper des jeunes enfants.
- Les petits magasins ouvriront en premier; d’autres magasins suivront.
- Les hôtels et les restaurants ouvriront à un stade encore plus avancé.
L’Autriche a été le premier pays européen à assouplir les mesures de confinement. Le 14 avril, elle a ouvert des ateliers de voitures et de vélos, des lave-autos, des magasins de matériaux de construction, de fer et de bois, des centres de bricolage et de jardinage (quelle que soit leur taille) ainsi que de plus petits concessionnaires avec un espace client inférieur à 400 mètres carrés. Ces magasins devaient s’assurer qu’il n’y avait qu’un seul client par 20 mètres carrés. Rien qu’à Vienne, 4 600 magasins ont été autorisés à ouvrir. Les heures d’ouverture étaient limitées de 7 h 40 à 19 h. La feuille de route pour les semaines et les mois suivants a envisagé le schéma suivant:
- 1er mai: tous les magasins, centres commerciaux et coiffeurs rouvrent.
- 15 mai: ouverture possible de services tels que restaurants et hôtels.
- 15 mai ou plus tard: réouverture possible des écoles.
- Juillet: Organisation possible – mais improbable – d’événements de toutes sortes (sports, musique, théâtre, cinéma, etc.).
À partir du lundi 20 avril, l’Allemagne rouvrira de petits magasins de moins de 800 mètres carrés, à condition que des mesures d’hygiène et de distanciation sociale soient en place. Les grands concessionnaires automobiles, les magasins de vélos et les librairies peuvent également rouvrir.
Les écoles rouvriront le 4 mai, donnant la priorité aux élèves qui doivent passer des examens. Les rassemblements de masse resteront interdits au printemps et en été. Aucune décision n’a été annoncée quant à savoir quand et si lever les restrictions sur les restaurants et les bars.
«Pass COVID»
Dans les pays qui connaissent actuellement d’énormes flambées de COVID-19, des dizaines de milliers de personnes vont malheureusement décédées. Ceux qui vont survivre à une maladie grave ou moins grave, avec ou sans hospitalisation, auront développé des anticorps contre le virus (Zhang 2020, Okba 2020). De même que les personnes infectées mais non symptômatiques, qui sont en plus grand nombre. Au total, des millions de personnes en Italie, en Espagne et en France auront ainsi des anticorps anti-SRAS-CoV-2.
En Corée du Sud et ailleurs, plus de 100 personnes qui se sont rétablies de COVID-19 ont été retestées positives (Ye 2020) craignant que les patients convalescents de COVID-19 puissent être réinfectés à nouveau, bien que rien n’indique que ces personnes soient contagieuses.
L’explication la plus probable est que l’infection a été réactivée chez les patients ou que les tests ont détecté de l’ARN non infectieux du virus. Des données très préliminaires issues d’une étude animale suggèrent que l’immunité acquise après une infection primaire peut protéger lors d’une exposition ultérieure au virus (Bao 2020).
À la mi-avril 2020, nous ne savons toujours pas si les anticorps protègent contre une deuxième infection. Il n’y a aucune raison de croire que les anticorps ne protégeraient pas comme le pense la plupart des chercheurs, mais des études supplémentaires sont nécessaires pour renforcer nos connaissances générales sur l’immunité liée à l’infection, en particulier si les anticorps neutralisants sont susceptibles d’être protecteurs.
Aprés une première infection par SRAS-CoV-2 suivie d’une évolution favorable il est probable que les patients ne soient pas vulnérables à une infection secondaire.
Il y a eu des spéculations sur la mise en place d’un passeport d’anticorps SARS-CoV-2, ou COVID Pass. Les personnes avec des anticorps neutralisants – supposés être protégés contre l’infection symptomatiques et asymptomatiques, et donc incapables de transmettre le virus – seraient autorisées à se déplacer librement. Cependant, non seulement il est trop tôt pour délivrer de tels pass (voir le paragraphe précédent), mais cela représenterait également un énorme défi logistique: le laissez-passer devrait-il prendre la forme d’une carte d’identité nationale coûteuse? Comment les citoyens seraient-ils contrôlés? Après combien de mois et d’années la carte serait-elle révoquée si les taux d’anticorps diminuaient avec le temps. Pour le moment, un statut sérologique positif au SRAS-CoV-2 peut être utilisé dans les établissements de soins de santé pour déterminer qui doit être en contact étroit avec les patients confirmés ou suspectés de COVID-1
La deuxième vague
Le dilemme auquel sont confrontés les pays à l’arrêt est de relancer l’activité économique tout en minimisant le nombre de nouvelles infections au SRAS-CoV-2 donc le risque de déclencher une deuxième vague de contagion.
Dans un avenir immédiat, il n’y aura pas de retour à la «vie avant COVID-19». L’étude susmentionnée de Ferguson (Ferguson 2020) prédit qu’après la levée des mesures strictes de «rester à la maison» (mesures de distanciation sociale extrême et mise en quarantaine à domicile), l’épidémie ne ferait que rebondir (figure 7)!
À quoi ressemblera notre avenir? Une existence pendulaire de trois mois « Rester à la maison » entrecoupée de quelques mois de « Sortir de nouveau »? Nous avons de bonnes raisons de penser que ce n’est pas viable économiquement. À moins qu’un médicament ou un vaccin miraculeux ne soit développé et produit rapidement en quantités suffisantes, les peuples du monde devront inventer des mesures intermédiaires. Les stratégies d’atténuation axées sur la protection des personnes âgées (réduction de 60% des contacts sociaux) et le ralentissement sans interrompre la transmission (réduction de 40%) réduiront certainement la maladie et le fardeau de la mort de moitié, mais entraîneraient toujours 20 millions de décès en 2020 (Patrick 2020 ). Pendant longtemps, nous pourrions tous porter des masques faciaux lorsque nous quittons nos maisons et compter sur une recherche intensive des contacts et l’isolement des cas une fois le confinement levé (Hellewell 2020). La crainte d’une deuxième vague de l’épidémie pourrait être présente pendant des années.
Figure 7. Impact des interventions thérapeutiques pour réduire la mortalité due au COVID-19 et la demande de soins de santé (Source: Ferguson 2020).
Heureusement, les gens ont la capacité d’apprendre. Dans toute deuxième vague de l’épidémie de COVID-19, il n’y aura pas de rassemblements de masse, pas de Championnat d’Europe de football de l’UEFA 2020 et pas de Jeux olympiques d’été 2020 à Tokyo. Les discothèques, les pubs et tous les autres endroits qui, il y a quelques semaines, mettaient les gens en contact étroit seraient fermés jusqu’à nouvel ordre. Dans la vie de tous les jours, chacun prendrait des mesures en cas de fièvre et de toux et suggérerait des mesures en étant témoin. Il y aura des tests à grande échelle avec une recherche étendue des contacts et des mesures de quarantaine qui en découleront (Nussbaumer-Streit 2020).
Perspectives
Les coronavirus ont parcouru un long chemin (Weiss 2020) et resteront avec nous pendant longtemps. Les questions ne manquent pas: quand les voyages en avion reprendront-ils? Pourrons-nous bientôt passer d’un pays à un autre? Quand pouvons-nous planifier nos prochaines vacances et retourner sur les plages et la vie nocturne? Portons-nous des masques faciaux pendant des années? Combien de temps vivrons-nous dans un monde fermé?
Les Français ont une formule précise pour exprimer leur réticence à vivre dans un monde que nous ne reconnaissons pas: « Un monde de con! » (N.D.L.R : en français dans le text original.) Heureusement, nous sortirons de ce monde de « con » grâce à une communauté scientifique plus vaste, plus forte et plus rapide qu’à tout autre moment de l’histoire. (Les politiciens sceptiques à l’égard de la science devraient-ils être évincés de leurs fonctions? Oui, s’il vous plaît, il est peut-être temps maintenant!) Aujourd’hui, nous ne savons pas combien de temps, combien sera intense et meurtrière l’épidémie. Nous marchons sur des terrains en mouvement, et dans les semaines et les mois à venir, nous devrons être flexibles et inventifs, trouver des solutions que personne n’aurait imaginées il y a quelques mois seulement. Bien sûr, cependant, la science ouvrira la voie. Si nous sautions trois ans dans le futur et lisons l’histoire de COVID-19, nous serions ravis.
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